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FRAGMENTS

de toutes les sciences que la philosophie sera pour la première fois visible.

Nous nous imaginons Dieu personnel, comme nous nous imaginons nous-mêmes personnels. Dieu est aussi personnel et individuel que nous : car notre soi-disant moi n’est pas notre moi véritable, mais seulement son reflet.

Il y a en nous certaines pensées qui paraissent avoir un caractère entièrement différent des autres ; car elles sont accompagnées d’une sensation de fatalité ; et cependant il n’y a pas de raison extérieure pour qu’elles naissent. Il semble que l’on prenne part à un dialogue, et que quelque être inconnu et spirituel nous donne d’une manière étrange l’occasion de développer les pensées les plus évidentes. Cet être doit être un être supérieur, puisqu’il entre en rapport avec nous d’une manière qu’il est impossible aux êtres liés aux apparences. Il faut que cet être nous soit homogène, puisqu’il nous traite comme des êtres spirituels et ne nous appelle que fort rarement à l’activité personnelle. Ce moi supérieur est à l’homme ce que l’homme est à la nature ou le sage à l’enfant. L’homme s’efforce à lui devenir semblable, comme lui s’efforce de devenir semblable au non-moi. Il n’est pas possible d’établir ce fait ; il faut que chacun de nous l’éprouve en soi. C’est un fait d’ordre supérieur, que l’homme supérieur saisira seul ; mais les autres s’efforce-