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ELVIRA


À peine Alvaro eut-il reçu ce papier,
Qu’il assembla son grand conseil,
Et du haut de son trône doré
Il lança trois fois vers le ciel un regard furieux ;
Puis, saluant à la ronde ceux qui l’écoutaient,
Il s’écria en colère : « Je suis cocu, Messieurs !

» Ramiro exploite ma femme : or, voyons quel
» Châtiment se peut infliger à lui et à elle ? »
Tous répondirent qu’en pareil cas,
Les Dieux interdisent toute pitié,
Et que le juste supplice des traîtres
Peut seul remédier à si mauvais exemple ;

Mais que, pourtant, avant de prononcer la sentence,
Il faut écouter les délinquants ;
Qu’il les fasse donc amener en sa présence,
Qu’il donne connaissance des preuves,
Et, s’il peut démontrer qu’il est cocu,
Les coupables subiront la peine qu’ils méritent.

Alvaro approuva tout, et incontinent
Furent expédiées une foule d’estafettes :
Il rappelle la Reine tout de suite
Et ne lui permet pas d’aller plus loin.
D’autres ont mission d’accomplir le vœu
Qu’elle a fait jadis au martyr Saint Toto.

Voici la Reine qui revient
Avec Ramiro, en toute hâte, à la ville.
Elvira est toute tremblante, la pauvrette,
Elle ne sait ce qu’elle doit craindre
Et, pour la tourmenter, pour l’inquiéter plus encore,
Son mari ne vient pas à sa rencontre.