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LE ROI BARBADICANE


Le cadre se mouvait sur des pentures,
Et l’on ne voyait pas ce truc excellent.
Le bonhomme, pour porter quelques robes,
Était allé à la campagne un matin,
Et, ayant emmené sa femme avec lui,
Il n’était rentré que le soir du troisième jour.

Tant qu’il attendit de Rome la permission,
Bien qu’il fût dès lors sûr de l’obtenir,
Barbadicane usa de quelque prudence :
Il besognait Grâce en secret,
Et, pendant que le tailleur causait en bas,
Sur le lit avec elle il se divertissait.

Le tailleur souvent venait dans la cour,
Rongé de jalousie et d’affreux soupçons ;
Il appelait sa femme, comme d’ordinaire :
Elle sautait à bas du lit, vexée,
Puis, montrant sa figure au balcon,
Elle riait de contempler ce babouin.

Le Roi, sacrant comme un Luthérien,
Souvent restait à mi-chemin ;
Alors, plein de rage et comme fou,
Il voulait faire mettre le tailleur en prison,
Ou bien le faire pendre. Voyez quel est
Le danger de se faire faire cocu par un roi !

Mais, la bulle venue, Barbadicane vit
Qu’il ne pouvait se permettre aucune violence ;
Par un caporal le tailleur fut avisé
Que, comme son Roi prenait femme,
Il le faisait inviter à venir à la Cour
Pour lui prendre mesure d’un costume.