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LE ROI BARBADICANE


C’était un jeune homme fort beau
Qui ne gouvernait pas trop injustement ;
Mais il ne savait pas tenir en bride son oiseau,
Et il avait pour les dames tant de goût
Que, s’il voyait même une femme en bonnet,
À toute force il voulait l’avoir dans son lit.

À peine à quinze ans était-il arrivé,
Que dans sa capitale tout entière,
Et dans toutes les villes de son royaume,
Dans chaque bourg, dans chaque hameau,
Au dire des historiens, on ne trouvait plus
Fillette qui fût encore vierge.

Le matin, quand il se levait,
Il pratiquait cette douce opération ;
Avant d’aller dîner, il battait le tambour ;
À goûter, il jouait un peu du croupion ;
Il s’en donnait encore avant d’aller souper ;
Enfin, au lit il s’escrimait, à panse que veux-tu.

Comme l’histoire le prouve, les rois
Ont eu presque tous un surnom
D’après leurs vices ou leurs qualités :
Le Bon, — le Borgne, — le Chauve, — le Sage.
De même, Barbadicane, à cause de son péché mignon,
Fut surnommé par le peuple : Verge de fer.

Il était tout enfant quand vint à mourir
Barbadicane le Rond, qui fut son père,
Et par les intrigues ordinaires des Cours,
Sa mère eut la régence du royaume.
Elle avait fait, s’il faut en croire Farnabio,
Porter au Roi tant de cornes, que cela faisait peur.