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MUSTAPHA


» Venez, je vous veux toutes en fête,
« Et en joie, et en allégresse, et en délire ! »
Les femmes dirent : — « Oh ciel ! qu’est-ce que cela ?
» Le tyran a-t-il changé de fantaisie ? »
Mais, craignant un piège, elles restent
Toutes timides, et ne savent lever les yeux.

— « Venez, ne craignez rien, » reprit-il,
« Mes belles dames, aimables et chéries ;
» Ma folle rigueur vous a été trop pénible,
» Me voilà changé ; je vous donnerai du bon temps ;
» Viens ici, toi, gentille petite boulotte,
» Étends-toi sur le canapé, que je t’arrange un peu. »

Ainsi parla le Génie, et il le fit pour tout de bon,
Et à une autre, et à une autre, et à une autre encore.
Sur ces entrefaites, voici que le vrai Mustapha
Regagne, plein de confiance, ses pénates.
Il frappe, personne ne répond ; il frappe encore,
Mais en vain, il crie : « Oh ! sont-ils tous sortis ? »

Capelbruno alors appelle un valet de chambre
Et dit : — « Va voir qui frappe si fort. »
Le valet de chambre se met à la fenêtre pour regarder
Et s’écrie : — « Que vois-je ? oh ! par le grand Dieu !
« Un maître à la porte, et un autre dans la maison !
» Il y a de quoi mourir de frayeur ! »

— « Qu’est-ce qu’il y a ? » crie Capelbruno,
« Ouvre, dépêche-toi ! — Mais, mon seigneur, mon maître !
» Il est ici certainement ! chacun le connaît !
» Quel événement étrange ! quelle confusion !… »
Pendant ce temps-là, Mustapha frappait de plus belle
En blasphémant Mahomet et sa Cour.