Page:Nouvelles de Batacchi, (édition Liseux) 1880-1882.djvu/402

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
174
DONNA CHIARA


— « Pardieu ! » s’écria Ildebrando, et il courut à toutes jambes
Dans la cellule d’où le bruit venait ;
Il vit blotti dans le lit le prêtre
Qui, de peur, n’osait remuer,
Et, se tournant vers l’abbesse qui venait d’arriver,
Il lui lança, en serrant les dents, un mauvais regard.

Un enfant qui s’éveille et qui entend
Son père en colère, le fouet à la main,
Lui crier : « Polisson, porc, impertinent,
» Je te déshabituerai de faire toujours au lit, »
Cherche, tout triste et tout effrayé, à cacher
Sous ses fesses le corps du délit.

L’abbesse ne fut pas moins honteuse,
Elle était consternée et ne savait que dire ;
Elle ne peut comprendre si elle veille ou rêve,
Et, pendant ce temps, les rires des nonnains,
La colère de Monsignor, et le vacarme
Que fait chacun, lui font perdre la tête.

Mais quelle lèvre pourra redire les injures
Que Donna Chiara vomissait !
— « Bravo ! Donna Ildegonda, ce sont de belles farces
» Que vous faites là ! Bravo, bravo, bravo !
» Qui aurait cru que si légère fût la jupe
» De cette sale archibisaïeule ?

» Quand je devrais mourir à la potence,
» Je veux d’ici sortir sur-le-champ :
» C’est dans un saint monastère, et non dans un sale bordel
» Qu’ont cru me mettre mes parents ;
» On m’a placée ici pour servir le Christ dans son temple,
» Et non pour être témoin de telle ignominie !