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DONNA CHIARA


» Celui qui vous implore n’est pas un sale frocart,
» Indigne de pénétrer dans votre lit ;
» Ce n’est pas un chapelain, ce n’est pas un chanoine,
» Mais, pensez-y bien !… c’est votre évêque !
» Adieu, ma chère, aimez-moi autant que je vous aime,
» Et consoles-moi en me répondant bien vite. »

Il fit remettre ensuite ce dégoûtant billet
Avec précaution à son trésor bien-aimé :
Donna Chiara, après l’avoir lu,
Le remit toute en colère à Donna Irene
Qui rit à n’en plus pouvoir et dit : — « Allons,
» Viens avec moi, je veux que nous lui répondions. »

La lettre écrite, elles prièrent le jardinier
De leur faire le plus tôt possible le plaisir
De remettre à Monsignor en propres mains
Un long panier qu’elles lui confièrent,
Et de dire à Monsignor que Donna Chiara le lui envoie,
Qu’elle le salue et se recommande à lui.

Il est difficile de dépeindre la joie extrême
Que firent ces paroles à Monsignor ;
Elle ne fut cependant pas telle, qu’elle le décidât
À donner un pourboire au messager :
Il ne lui aurait pas, tant il était avare,
Fait cadeau, même de l’eau du lavabo.

Plein d’impatience, il prit son canif,
Quand il fut seul et sans témoins,
Décousit le panier, et dedans il trouva
Un petit billet lié à une paire de grands ciseaux ;
Mais quand il lut ce qui y était écrit,
Ses cheveux se dressèrent de rage sur sa tête.