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DONNA CHIARA


« Monsignor Illustrissime, et cætera,
» Je ne me rappelle plus dans quel auteur j’ai lu
» Que le monde va de mal en pis en vieillissant.
» N’importe qui l’a dit a fort bien parlé ;
» Je vois et je sens la vérité de ces paroles
» En exerçant l’autorité dans mon couvent.

» Les sœurs sont un tas de péronnelles,
» Et elles sont devenues maintenant si effrontées
» Que, sans se soucier de nos règles,
» Elles font l’amour à la porte et aux grilles
» Où les fait appeler le premier venu,
» Prêtre, moine, ou simple damoiseau.

» Je vois qu’ils se prennent par la main
» Furtivement, sans faire semblant de rien ;
» Ils font des chuchoteries bien bas, bien bas…
» Mais, pendant ce temps, j’attrape toujours quelque fluxion ;
» Je n’ai pas le tympan trop sensible
» Et je ne puis comprendre ce qui se dit.

» Il faudrait vous dire encore la grande consommation
» Qui se fait de rosolio, de pâtes et de caquets ;
» Un boucaut de sucre s’est envolé en fumée…
» Quel ennui ! Il coûte si cher maintenant !
» Outre le badinage d’amour,
» Leurs galants font encore les escrocs.

» Donc, pour porter remède à un tel désordre,
» Il me semble qu’il est nécessaire
» Que Votre Seigneurie promulgue un ordre
» Et qu’elle nous l’envoie par son caudataire ;
» Mais un ordre sévère et bien formel,
» Qui à ces galopins interdise l’entrée du couvent.