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LE ROI BISCHERONE


Cette proposition plut au roi Bischerone
Et il commença à faire mine de rire ;
Alors se leva, cachant mal son mépris,
Le comte Lasca, qui se mit à crier :
— « Bischerone, je sais bien que tu m’as dans le cul,
» Parce que comme tous ces gens-là je ne te flatte pas.

» Mais, quand même sur le cou j’aurais la hache,
» Toujours tu m’entendrais dire la vérité ;
» Ici a été publié un édit, et pas pour rire,
» Par lequel tu as promis ton royaume et ta fille
» À qui viendrait te la demander
» Dans la forme que l’édit a ordonnée.

» Mirtillo a rempli les conditions… il croit,
» Et il en a le droit positif et incontestable,
» Tout obtenir… Mais il est berger ! Dieu
» Voit le prince et le berger du même œil ;
» Même il met le prince après le berger,
» Si le prince fonde son pouvoir sur le mensonge.

» Un prince qui a donné sa parole
» Doit à tout prix la tenir ;
» Ainsi je suis d’avis que ta fille
» Et ton royaume soient donnés à l’étranger ;
» Mais mon avis est inutile, là où l’on n’écoute
» Que les conseils de l’infâme et stupide fourberie.

» Il est inutile ici, où de sots et d’esclaves
» Un timide conseil s’assemble,
» Où du Prince on flatte les vices dégoûtants,
» Où l’on ne pense qu’à faire fortune.
» Rendre justice, ces gueux le savent bien,
» C’est pour Bischerone jeter de la poudre aux yeux. »