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LE ROI BISCHERONE


Ainsi de la terre Crétoise dans l’air impalpable
S’élança pour fuir un cruel exil
Dédale, complaisant de l’impudique Pasiphaé,
Entraînant avec lui son fils imprudent ;
Tel encore sur Pégase ailé
Pour sauver Andromède accourut Persée.

En traversant les régions aériennes,
Il remplit de stupéfaction tous ceux qui le virent ;
Le rosaire à la main, les paysans
Le suivaient en disant des patenôtres ;
L’un croit que c’est un ange du royaume des cieux,
L’autre le fuit comme un diable de l’enfer.

Les religieuses vieillies dans les couvents
Se compissèrent de surprise et de peur,
Les jeunes s’écriaient gaiement et en riant :
« Notre révérence, dame clôture ! »
Les avares tremblèrent, et dans leurs antres noirs
Les douaniers s’arrachèrent la barbe.

Les libertins, trépignant de plaisir,
Tournèrent vers la barque leurs regards joyeux,
Espérant que si, à force d’argent,
Ils arrivaient à surprendre un si beau secret,
Ils feraient tomber dans leurs filets Sainte Ursule
Et ses onze mille compagnes.

Mais les bigots crièrent : « Contemple le merveilleux
» Prodige, et tremble, immonde pécheur ;
» Désormais le repentir est vain ; le moment est venu
» Où, sorti de ses gonds, va s’écrouler le monde. »
Cependant Mirtillo découvre vers le soir
Les murs élevés de Pontadera.