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LE ROI BISCHERONE


Vis-à-vis, sur une petite terrasse,
Entouré de pages, se tenait Bischerone ;
D’une grande cape rouge de fine peluche
Toute brodée d’Arabesques, il était revêtu :
Il portait son sceptre et sa couronne de souverain
Toute resplendissante des gemmes de Murano.

Arrivés sous l’arc de triomphe,
Les Ambassadeurs lui firent un compliment ;
Il répondit en Latin : « Amicus, vale,
» Et hic prestum revertere memento. »
On entendit alors de grands cris d’allégresse
Et les canons de la forteresse firent feu.

De leur char les Ambassadeurs descendirent
Et montèrent dans un vaste et grand carrosse ;
Quand ils s’y furent bien installés,
Et qu’ils eurent donné un pourboire au garçon d’écurie,
Ils furent emportés par huit belles bêtes
De la race du prince de Lori.

Après leur départ, les Magistrats
Retournèrent en désordre à la maison commune ;
Le peuple, qui était foulé et pressé,
S’écoula peu à peu de ci et de là,
Et, au débouché des rues et des ruelles,
Donna gros à gagner aux coupeurs de bourses.

Bischerone, tout joyeux, rentra au palais
En disant aux courtisans : « Quelle belle fête !
» Y a-t-il un autre roi qui puisse, foutre !
» En imaginer une comme celle-ci ? »
Et chacun répondait d’un air renfrogné :
— « Comme celle-ci ? c’est impossible !… oh ! bien sûr ! »