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LA VIE ET LA MORT


De même, la Mort se tourmente et gémit.
Le prêtre Ulivo la laissa là-haut et partit.
Elle se mit tantôt à crier, blasphémer ou geindre,
Tantôt à implorer pitié ; mais tout fut inutile.
Le prêtre Ulivo alla chasser dans les environs,
Et la laissa sur ce poirier pendant trois jours.

Cependant, un grand scandale en tous lieux
Éclatait ; personne ne mourait plus ;
Ni dans le paradis, ni dans l’antre affreux
Où brûle le feu éternel, personne ne comparaissait,
Et le diable, en blasphémant sur le pas de sa porte,
S’écriait : « Par la foi de Dieu ! la Mort est morte ! »

Tout était dans le trouble, dans la confusion,
Au ciel, sur la terre, et dans l’abîme profond.
Le bruit en vint enfin jusque dans cette région du ciel
Où le Père Éternel a établi son séjour ;
Et lui, pour mettre fin à ce tintamarre,
Envoya sur la terre l’archange Gabriel.

« Va, » lui dit-il, trouver le prêtre Ulivo,
» Fais qu’avec la Mort enfin il s’arrange,
» Afin que le paradis ne reste privé
» Du glorieux triomphe des justes,
» Et que, pour les impies, ne soit retardé l’éternel
» Et mérité châtiment de l’enfer. »

Il dit, et l’envoyé, prompt à obéir,
Se mit à voler la tête la première,
Si vite qu’il aurait dépassé Borée
Ou la foudre s’élançant de la profondeur des nuages.
Quand il fut près de la terre, vite il referma
Ses ailes rapides, et s’arrêta au sommet d’une montagne.