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MADAME LORENZA


» Eh ! écoutez… tant qu’ici restera
» Le religieux, tant qu’avec moi il causera,
» Que personne n’entre… Vous direz que j’ai mal
» À la tête…, que j’ai besoin de repos… ;
» Faites, si par hasard c’était l’Empereur,
» Le signal ordinaire… mais il ne vient jamais à cette heure. »

Con-gros obéit et comprend bien
Ce que du moine la Duchesse veut ;
Celle-ci, en attendant, examine sérieusement
Comment il lui faut se poser, comment elle l’accueillera,
Et l’Amour lui suggère aussitôt
Manières, regards, gestes et position.

Arrive le père Alfonso ; sur son visage
Brillent les couleurs d’une santé parfaite :
Il n’est pas gentil et soigné comme Myrtil,
Ce n’est pas un Adonis, mais on dirait Alcide ;
Il est beau dans sa rudesse ; à son air, à son maintien,
On voit qu’il est fait pour les luttes amoureuses.

La Duchesse était couchée dans son lit ;
Elle avait, sous couleur de négligence,
La poitrine nue, plus blanche que ses draps blancs ;
Ferme, bien saillant, arrondi,
Son derrière se détachait de profil :
Chose qu’à un moine on ne fait voir en vain.

Le jeu de ses prunelles languissantes,
Sa langue qui souvent sortait de ses lèvres
Et les arrosait de fines gouttelettes,
Son silence, sa respiration fréquente
Qui mettait sa gorge en mouvement comme l’onde
Quand, au souffle d’un vent frais, elle va baiser le rivage ;