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MADAME LORENZA


Ou il ne pense plus à l’injure reçue,
Ou elle lui paraît un rien, une misère ;
Il sent son cerveau vide, sa langue muette,
Il désire tantôt rester, tantôt partir.
Ainsi, confus et incertain, il s’avance
Auprès de Refenero qui est assis, l’air farouche.

Il lui prend alors un tremblement si fort,
Qu’on le dirait saisi par la fièvre quarte ;
Et, plutôt que de se retrouver à pareille aventure,
Il préférerait voir sa fille putain,
Excommuniée par la Sainte Église,
Tant est lourd le poids qui pèse sur son cœur.

Cependant il dit : « Majesté… ma fille…
» Et on n’y voyait pas… Le Capitaine…
» La servante… et elle pleure, et rien ne la console…
» L’honneur ! ou bien ç’aura été le chapelain…
» Pardonnez, de grâce, si je m’embrouille !…
» Vous lirez le fait sur ce papier. »

Ce disant, il fouilla dans toutes ses poches,
Et, le visage couvert d’une pâleur nouvelle,
Il s’imagina avoir perdu le papier,
Mais il vit ensuite qu’il l’avait mis dans son sein ;
Il l’en retire et le présente, craintif,
Sur son chapeau pelé et poudreux.

Le Monarque tend gravement la main,
Le prend et y jette les yeux,
Puis le replie, fait la moue,
Lève une épaule, se tourne d’un autre côté,
Et s’écrie : — « Oh ! mon fils !… c’est une affaire d’un genre !…
» Et vous venez à moi ?… Qu’y puis-je faire ?…