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MADAME LORENZA


Père stupide ! Il était bien loin
De deviner quelle était l’actrice de pareille scène ;
Brigida, qui entendit au troisième étage
Crier à tue-tête sa jeune maîtresse, dit :
« Que peut-il y avoir ? » Elle laisse là ses affaires
Et d’un pied agile monte les escaliers.

Au premier étage à peine elle était arrivée,
Que le Capitaine, qui se tenait sur la porte
Depuis qu’il avait entendu la voix de Rosina,
L’empoigne, l’emporte à son cou
Sur le lit, lui lève la cotte et exhibe
Le père commun des petits et des grands.

Telle fut la surprise dont fut saisie
Notre Brigida à cette attaque imprévue,
Que, désormais privée de tout sentiment,
Elle ne parut s’apercevoir ni du contact, ni du mouvement ;
Mais une note de Turpin dit ici
Qu’elle faisait la chattemitte.

Revenue à elle, comme une anguille dans l’eau
Elle se met à se démener sur le lit.
À la fin, par convenance, elle poussa les hauts cris, elle aussi,
« De grâce !… arrêtez !… lais… laissez-moi tranquille ! »
Le Capitaine va son train,
Brigida se tait, elle rougit, elle frétille.

La pauvre Rosina s’était aperçue
De l’outrage que lui avait fait ce vilain Moine ;
Pour courir auprès de son père elle ouvrait la porte,
Quand les cris poussés par sa servante
Parvenant à son oreille, craintive, elle s’arrêta
Et pour le moment ne vint pas en bas.