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MADAME LORENZA


» De là, en bas, où il est, certainement il lui voit les cuisses,
» Que moi, en me tenant ici, je ne puis bien voir ;
» Dans cette obscure retraite, d’un prix bien supérieur
» À la lumière du soleil, il fait peut-être pénétrer ses regards !
» Ah ! puissé-je par une conjuration magique
» Changer en mur mon manteau !

» Ah ! qui sait quelle flamme ardente
» Lui allume au cœur ce spectacle charmant !
» Peut-être aspire-t-il déjà à voir encouragé
» Et favorisé son dessein de tout entreprendre !
» Je saurai le prévenir… ce qu’il regarde,
» Ma main ne tardera pas à le toucher. »

Pendant qu’il exhale ainsi sa jalousie,
Le Capitaine de la même façon
Laisse éclater la peine cruelle qui le ronge :
« Ah ! ce moine loge plus haut que moi !
» Un court escalier le sépare…, il couche juste dessous ;
» Qui sait combien le tente ce friand morceau ?

» Aussitôt qu’elle passe, il vient dehors ;
» Il lève la tête, l’accompagne des yeux,
» Et, de voir cette beauté qui m’inspire tant d’amour
» Montant son escalier comme une montagne escarpée
» Il m’empêche avec son maudit manteau ! Ah ! c’est ainsi
» Que les nuages obscurcissent les rayons du soleil ! »

L’âme remplie de semblables pensées,
Ils se montraient le jour tristes et affligés ;
Ils ne goûtaient la nuit ni calme ni repos :

Ce n’étaient pas leurs cheveux qui se dressaient, mais autre chose.

Pendant ce temps, la modeste et jeune vierge
Dormait tranquille dans son humble chambrette.