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LES TOC-TOC


Le Comte, arrivé au comble du bonheur,
Voulut rengainer son instrument ;
Mais Assunta lui dit : « Quoi ! Messer,
» La magie est si vite finie ?
» ― Non, » répondit-il, « il faut cinq reprises
» Pour extraire le bon onguent. »

Et cinq fois il répéta la douce extraction.
À la cinquième, il n’avait plus de souffle,
Et la renommée prétend qu’il eut beau faire effort,
Le cinquième coup fut tiré à sec.
Ah ! combien de gens en amour veulent faire des prodiges,
Et prétendent agir en moines, en capucins !

Le Comte alors recommença ses conjurations,
Et d’un ton impérieux ajouta :
« Au nom de la puissance de ces cinq onguents,
» Rapportez le bassin, misérable canaille ! »
Cela dit, il s’approche de la porte, empoigne l’objet perdu,
Et, avec un léger bruit, le jette à terre.

Assunta de joie fit une culbute,
Elle ne tenait dans sa peau, tant elle était contente !
Elle jeta ses deux bras autour du cou du sorcier ;
Disant : — « Ah ! béni soit l’onguent
» Qui a si bien arrangé mes affaires,
» Que je perdrais volontiers encore le bassin ! »

Ils se séparèrent alors, et, le jour suivant,
Assunta apprit la nouvelle au Curé,
Lequel, à peine ce message reçu,
Partit de San-Fabiano comme un trait
Et fit, tant il avait hâte d’arriver,
Crever deux chevaux sous lui.