Page:Nouvelles de Batacchi, (édition Liseux) 1880-1882.djvu/258

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
30
LES TOC-TOC


« Effrontée coquine ! » dit-il enfin, « par Dieu !
» Si tu l’as perdu, arrange-toi pour le retrouver,
» Ou tu le paieras bien cher !…
» Je te le jure par la chape de Saint Charles,
» Si tu ne le retrouves pas, je te ferai mourir sous les coups,
» Quand même tu te réfugierais dans le ciboire.

» Remercie Dieu de ce que je ne veux faire d’esclandre
» Aujourd’hui, que nous avons messe pontificale et musique ;
» Mais si demain tu ne viens me le présenter,
» Tout l’art des chirurgiens ne pourra te sauver :
» Quand même le Souverain Pontife te défendrait,
Il ne pourra m’empêcher d’être ton bourreau. »

Longtemps il continua sur ce ton
Et le dîner fut presque suspendu ;
Mais les prêtres avaient chanté tierce et sexte,
Et l’on entendait les sonneurs branler les cloches à l’unisson ;
Il se tut donc et descendit dans la sacristie.
Là, pas de bassin, ce qui augmenta encore sa colère.

Il déchira les fines aubes, il donna un coup de dent
À l’étole, tant il était furieux !
Il marcha comme un fou vers l’autel
Et scandalisa toute l’assistance ;
Il détonna au Gloria, au Credo, il maltraita
Les oraisons et malmena la préface.

Il s’enferma dans sa chambre et ne parut pas
À table pour faire les honneurs du repas :
À Vêpres, il eut l’air d’un vrai basilic,
Et l’on ne put achever le Concerto,
Parce qu’avec une moue longue d’une aune,
Il fit, au beau milieu, attaquer le psaume suivant.