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FRA PASQUALE


Alors dans son esprit roulant diverses pensées,
Il médite tantôt l’une, tantôt l’autre ;
Après longue réflexion il se décide enfin
Pour une bonne farce à jouer à son rival,
Et, vers la garde qui était là tout près,
Il s’achemine d’un pas pressé.

Il demande à parler au chef
Pour une affaire d’importance extrême,
Et, parvenu devant le Capitaine :
« Signor, » lui dit-il, « écoute un cas étrange ;
» Chez une putain, qui demeure ici près,
» Un frère Franciscain vient d’entrer.

» Il y a quinze jours que je suis arrivé ici
» De la province pour certaine affaire ;
» L’ayant à la fin arrangée,
» J’ai résolu de rentrer dans ma garnison,
» D’autant plus que par lettres m’y invite
» Mon commandant qui m’a donné mon congé.

» Pendant que j’étais à attendre que le cheval
» Me fût amené de l’écurie par le domestique,
» J’ai vu entrer là un moine,
» Bien sûr pour mettre ses pendeloques en danse ;
» Il se cachait, il regardait tout autour de lui,
» Il paraissait craindre le déshonneur et l’infamie.

» Cette maison est suspecte, je le sais par expérience,
» Car j’y ai souvent bu bouteille ;
» Il s’y trouve une belle créature sans barbe,
» Facile, discrète, belle à merveille,
» Faite tout exprès pour nous autres soldats
» Et qu’il ne faut pas laisser aux mains des moines.