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FRA PASQUALE


Et il dit : « Allume la lumière, bougresse,
» Je veux me déshabiller. » Rosa, tout humble,
Lui pardonne cette épithète grossière ;
Elle prend bien vite en main amadou et briquet,
Et, à chaque coup qu’elle frappait,
Le cœur du moine faisait toc-toc.

Mais Rosa, qui était une rusée femelle,
À semblables aventures dès longtemps habituée,
Avait, avant de se coucher, humecté l’amadou
Au moyen d’une compresse légèrement mouillée.
Elle employait ce petit procédé, toutes les fois
Qu’elle faisait quelque douce contrebande.

Longtemps elle battit le briquet ; enfin : « À vous, » dit-elle
À l’officier, « Je n’en puis tirer une étincelle. »
L’officier s’y mit, et fit tous ses efforts,
Mais la pierre a beau briller sous les coups :
Le feu ne se communique pas à l’amadou humide,
Et l’étincelle fugitive meurt inutile.

L’officier lâcha un terrible juron ;
Il jeta à terre l’amadou et la pierre ;
« Eh bien ! je me déshabillerai dans l’obscurité, »
Dit-il, et il déposa sa terrible épée de combat.
— « Allons, » lui dit la dame, « je vais vite au lit,
» Je veux chauffer votre place. »

Le Provincial, tout tremblant sous le lit,
Comprit le but de ce zèle mensonger ;
Mais cela fut loin de le rassurer,
Et il dit : « Que le ciel me protège ! »
Cependant l’officier s’était déshabillé ;
Il entra dans le lit auprès de donna Rosa.