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LAISSONS LES CHOSES


Tel qui, anxieux, d’une vieille tante
Ou d’une grand’mère décrépite attendait
Le gras héritage, à sa mort,
Tristement se grattait le fessier,
Parce que la maudite vieille lui laissait,
Sans un sou vaillant, une pleine caisse de ces joujoux.

De gracieuses cantatrices, d’aimables danseuses
Avaient bien attrapé plus d’un milord,
En lui rendant à la fin son outil
Tout rongé par un mal virulent ;
D’autres, pour ravoir leur joyeux
Ustensile, parcouraient le monde entier.

Mais enfin arriva un fait qui, plus que tous ceux
Que jusqu’à présent j’ai racontés,
Mit les galants au désespoir,
Et fit naître de si scandaleux procès,
Qu’Amour et Nature en furent obligés
D’abolir incontinent ce nouvel usage.

Il y avait… inutile de vous dire la ville
Où résidait un méchant avare
Dont le surnom était Gambatorta,
Lequel donnait aux pauvres de l’argent
Sans exiger d’eux autre chose
Que soixante pour cent d’intérêt.

Cet homme était si cruel et inhumain,
Que vainement, à un taux si élevé, on lui offrait
Une caution : sans avoir le gage en main,
Le traître n’aurait pas donné un sou ;
Aussi avait-il chez lui plus de pierres précieuses
Que n’en produisent les contrées d’Orient.