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LE ROI GRATTAFICO


La princesse le suivit, et avec elle
Grattafico invisible s’avança ;
Après de longs détours, dans un caveau profond
La dame affligée et le gardien entrèrent ;
Et Grattafico sentit, dans ce lieu plein d’horreur,
Son cœur ému d’effroi et de compassion.

De grosses colonnes de pierre jaunâtre
D’une architecture solide et imposante,
Impénétrable à la filtration des eaux,
Servaient de soutien à une grande voûte, d’où pendait
En longues touffes la mousse verte, que le vent
Faisait trembler lentement, lentement.

De loin on entendait répéter le bruit des pas
Par un écho sourd et effrayant ;
La flamme légère, au milieu du souterrain
Répandait une clarté faible et indécise,
Et divisait, dans la chambre funèbre, l’ombre
Qui, dans le lointain, paraissait plus épaisse.

Tirés d’une fosse trop pleine
Pour revoir les rayons d’un jour incertain,
En deux monceaux, les ossements desséchés
Se dressaient là autour des piliers ;
Et la pourriture bien loin
Faisait tomber en roulant les têtes humaines.

Une nef spacieuse aboutissait
À un cercle orné d’arcs et de colonnes,
D’où jusqu’à la grande voûte montait
Un temple fait de marbre noir ;
Quand la triste compagnie y fut arrivée,
Le gardien ouvrit une petite porte.