Pour cette mission, le comte Lippa fut choisi :
C’était un homme sage et de grand talent.
Arrivé en présence de Grattafico,
Après lui avoir fait sa révérence et son compliment,
Il dit : « Que Dieu conserve de longues années
« Votre Majesté dans sa grâce !
» L’homme sauvage dans sa caverne
» Pleure, quand le soleil resplendit dans le ciel ;
» Et quand un épais nuage fait la nuit en plein jour,
» Il rit, il est content, il se réjouit ;
» C’est qu’il espère, s’il pleut, le beau temps,
» Et s’il fait du soleil, il craint la pluie et le tonnerre.
» Puissant Seigneur, nous sommes dans le même cas ;
» Nous nous sentons heureux sous votre main,
» Il règne dans vos états un carnaval
» Perpétuel, plein de douceur et de gaieté,
» Et l’on ne vivait sûrement pas aussi heureux
» Quand régnaient Saturne et Rhée.
» Pour le recouvrement des droits et des impôts,
» Par Dieu, vous vous contentez de ce qui est honnête,
» Vous nous tondez, mais non pas jusqu’à la peau
» Et nous vous en sommes encore bien obligés.
» La femme n’excite pas votre appétit,
» Et par vous aucun mari n’est cocu.
» L’abondance ne se lasse pas de vider ici,
» Grâce à vous, sa corne bien remplie ;
» Nous avons dans le royaume des poètes à foison,
» Toutes les sciences ornent votre empire,
» Nous avons ici d’illustres et parfaits philosophes
» Qui savent faire… par Dieu ! jusqu’aux almanachs !