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LE FAUX SERAPHIN


Mirtillo, qui sournoisement regardait la jeune fille,
Tout en débitant son angélique discours,
Lui souriait de temps en temps
Et se moquait de la vieille en prières ;
Messer Priape, cependant, tout doux, tout doux,
Sortait la tête hors du nid.

Bita, qui toute nue se voyait,
Et qui avait devant elle Mirtillo tout nu,
Était consumée tantôt de honte et tantôt d’amour ;
Elle ne pouvait rester tranquille un seul instant,
Et riait en contemplant la vertu
De cette chose qui se dressait et s’abaissait.

Aussi la vision fit-elle en ce moment
Sur l’esprit des deux femmes un effet bien divers.
C’était un Séraphin du haut des cieux descendu :
L’une le crut, et pleine de respect,
Elle se mit à genoux et baisa les traces des pas
Laissées sur le sol par l’esprit céleste.

L’autre s’aperçut bien qu’un grand mystère
Se cachait sous cette malicieuse apparition ;
Elle ne crut pas que ce fût un ange véritable
Comme l’indiquait le déguisement qu’il avait pris ;
Elle reconnut en lui un jeune homme bien tourné
Et sentit son cœur profondément blessé.

Dire tout cela à sa mère,
La prudence de temps en temps l’y engageait,
Mais, plus fort qu’elle, l’amour victorieux
Lui ordonnait de se taire,
L’amour qui, lorsqu’il s’est emparé d’un cœur,
Ne souffre pas de partage.