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LE FAUX SÉRAPHIN


» Dans le malheureux état où nous sommes,
» Il faut nous recommander à Dieu ;
» Bita, récitons le saint rosaire,
» En connais-tu les paroles ?… Je les dirai, moi… »
Elle fait le signe de la croix et commence ainsi :
« deus, in adjutorium meum intende. »

Un chasseur, que les deux femmes n’avaient pas vu
(Il se nommait Mirtillo) s’aperçut de leur disgrâce ;
Il était dans la fleur de la jeunesse,
Avec une longue chevelure d’or
Et un menton imberbe ; favori de Vénus,
Jamais le beau sexe ne le rebutait.

En voyant la belle Margherita
Qui exhibait le délicat sentier d’amour,
Il sentit s’ouvrir dans son cœur une large blessure,
Et il eut vite imaginé un stratagème,
Tel que je défie le plus habile archiviste
De Cupidon, de m’en citer un mieux trouvé.

Il se retira dans un endroit très écarté
Et là, après avoir ôté tous ses vêtements,
Il se dépouilla aussi de sa blanche chemise,
Dénoua ses cheveux, les laissa flotter au vent,
Se mit une ceinture de soie
En bandoulière, et se la noua au côté.

Il s’en servit pour cacher ses génitoires ;
Puis, d’une oie tuée à la chasse,
Au dos, par un fil, il s’attacha les ailes,
Et il eut ainsi l’air d’un Séraphin ;
Mais un Séraphin sorti du pinceau
De Michel Ange serait beaucoup moins beau.

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