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LE FAUX SÉRAPHIN


Alors, de dévotions et de pénitences
Ils se mirent à causer entre eux,
Ainsi que de saintes apparitions, et des indulgences
Que le Saint Père a coutume d’accorder,
Et pendant qu’ils discouraient de la sorte,
La route se faisait plus déserte.

Les arbres épais s’élevaient jusqu’au ciel,
Interdisant tout accès aux rayons du jour ;
À une faible et indécise clarté, le voyageur
Ne voyait autour de lui que précipices ;
Un silence profond cependant imprégnait
Dans le cœur une froide horreur.

Le moine alors s’arrêta, et résolument
Dit : « Il ne s’agit pas ici de compliments,
» Ce n’est pas pour rien que je suis venu jusqu’ici. »
Et en parlant ainsi, il sortit ses pistolets ;
Alors Pollonia épouvantée poussa des cris ;
« À l’aide ! Au secours ! » dit Margherita.

— « Moins de paroles, pardieu ! sortez votre argent ! »
Cria le moine, « ou je vous brûle la cervelle.
» Allons vite, les bagues, les boucles d’oreilles,
» La cape, le rochet de pèlerin, la robe…
» Je n’ai pas l’habitude de répéter mes ordres,
» Vite, pardieu ! je veux jusqu’à la chemise ! »

L’impie malandrin leur enleva tout
Et les laissa nues en pleine forêt.
Alors Pollonia : « Ô Saint Pellegrino ! »
S’écria-t-elle, « il ne nous manquait plus que ça !
» Oh ! cruel tourment qui me martyrise,
» À mon âge, montrer mes nudités ! »