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LE FAUX SERAPHIN


Dans un vaste royaume, nommé l’Antignano,
Vivait jadis une certaine Pollonia,
Qui, après la mort de son mari Bastiano,
Jouissait d’une assez honnête aisance,
En compagnie d’une fille seulement
Qui était une merveille de beauté.

Cette fille avait à peine dix-sept ans accomplis,
L’amour pour elle subjuguait tous les cœurs,
D’un autre côté, elle n’éprouvait pas
Les amoureux tourments et vivait libre de tout lien.
Elle passait sa vie tranquille et paisible
Et se nommait… attendez… Margherita.

La mère avait soixante ans passés
Et jouissait encore d’une bonne santé ;
Mais elle avait les yeux bordés de rouge
Avec les paupières renversées en dehors,
Ce dont elle se montrait bien désolée,
Car elle avait peur de perdre la vue.

Du côté de sa maison on voyait tourner
Un million de moines allant et venant,
Capucins, frères chaussés, réformés,
Minimes, jacobites, récollets,
De qui elle recevait assez de louanges
Pour en faire un autre Kyrie eleison.

Les moines restaient souvent à dîner
Et recevaient encore des aumônes pour dire la messe :
Il convient de faire ici une observation
Et je crois bien qu’elle me sera permise,
D’autant plus qu’elle a été faite par Bellarmin
Qui a écrit cette histoire en bon Latin.