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FRÉDERIC DE HARDENBERG, DIT NOVALIS.

habituellement. Ceux donc qui n’ont pas eu le bonheur de le connaître personnellement, recevront avec indulgence cette notice que nous ayons puisée dans les souvenirs d’un commerce intime, qui par malheur n’a eu qu’une trop courte durée. Le père de Novalis, le baron de Hardenberg, était directeur des salines dans le royaume de Saxe. Il avait été soldat dans sa jeunesse et conservait toute sa vie une grande prédilection pour cet état. C’était un homme robuste, d’une activité infatigable et d’un caractère ferme et sévère, tel qu’on nous a peint les anciens Germains, nos ancêtres. Sa piété le fit s’associer plus tard à la communauté des frères moraves, ce qui du reste n’altéra en rien la sérénité de son âme et la franchise de ses manières. La mère de Novalis appartenait à la même communauté. Cette femme joignait à des manières nobles et distinguées une piété et une charité exemplaires. Plus tard elle supporta la perte de presque tous ses enfans, qui moururent à la fleur de l’âge et après avoir donné les plus belles espérances, avec une résignation vraiment chrétienne. Novalis (Fréderic de Hardenberg) naquit le 2 Mai 1772 dans une des terres que sa famille possédait dans le comté de Mansfeld. À l’exception d’une sœur, qui avait une année de plus que lui, il était l’aîné de onze frères et sœurs. La santé de Novalis dans sa première jeunesse était très-délicate. Il avait l’air d’un enfant doux, absorbé par une rêverie continuelle. Il ne montrait que peu d’esprit, fuyait la société des autres enfans, et ne se distinguait que par un amour extraordinaire pour sa mère. Celle-ci, sa sœur aînée et deux de ses frères presque du même âge que lui, étaient sa seule société. À l’âge de neuf ans il fut attaqué, d’une dyssenterie, suivie d’une atonie de l’estomac si opiniâtre, que l’usage seul des irritans le plus douloureux put le guérir enfin. C’est après cette grave maladie que son esprit parut pour ainsi dire se réveiller d’un profond sommeil ; le jeune Novalis se montra tout à coup vif, actif, spirituel. Son père, que ses oc-