Page:Nouvelle revue germanique, tome 9, 1831.djvu/164

Cette page a été validée par deux contributeurs.

adversaires des projets que nous saurons déjouer. Ou bien nous convenons d’attirer l’ennemi par un mouvement rétrograde. Soudain nous tombons sur lui, et il se rend sans coup férir. Quelquefois aussi nous lui inspirons une terreur subite ; c’est là ma panacée : mais les médecins expérimentés se défient de ces remèdes universels.

Que je suis heureux après une telle journée de me trouver seul avec Alabanda ; de parcourir, avec lui, à cheval, les collines dorées par les derniers rayons du soleil couchant, et les montagnes sur le sommet desquels le zéphir agite la crinière de nos coursiers et se mêle à nos entretiens, pendant que les yeux se tournent vers Sparte, le noble prix de nos efforts. Et quand, au retour, nous goûtons le frais en vidant la coupe, tandis que la lune éclaire notre rustique repas, et que les exploits de nos pères sortent, pour ainsi dire, du sol de la patrie, nous nous tendons la main, nous nous embrassons avec un sentiment difficile à exprimer.

Alors Alabanda parle de ceux qui s’indignent de la marche du siècle, des fausses routes qu’on prend depuis que l’homme a dévié du droit chemin, et moi, je songe à Adamas, à ses voyages, à son désir de pénétrer dans l’intérieur de l’Asie. Hélas ! bon vieillard, ce ne sont là que des palliatifs ! viens avec nous ! notre monde, c’est le tien ! Et le tien aussi Diotima, car il t’appartient. Ah ! puissions-nous le créer comme tu le sens, ange de paix et d’innocence !


HYPÉRION À DIOTIMA

Nous avons été vainqueurs dans trois escarmouches. Les combattans se croisaient comme les éclairs, et s’agitaient comme la flamme dévorante. Nous sommes à Navarin et devant Mistra, ce reste précieux de l’ancienne Sparte. Non loin de la ville j’ai arboré sur une ruine le drapeau que j’eus le bonheur d’enlever à une horde d’Albanais. Ivre de joie, j’ai jeté mon turban dans l’Eurotas et pris le bonnet grec.