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Après douze travaux, après mille combats,
Tu penses respirer au bout de la carrière ;
Et tu ne t’attends pas à te voir sur les bras
Un tyran qui triomphe en mordant la poussière.

Ivre de sang humain, de sang insatiable,
Antée, affreux Titan, croit honorer les dieux
Gardant pour leurs autels les reliefs de sa table :
Que ne couvre-t-on point d’un zèle spécieux !
De crânes entasses par un triste carnage,
Il prépare à Neptune un sanguinaire hommage :
Tout un temple bâti de ce funeste amas.
Jusqu’où va la fureur des dévots scélérats !
A celle de ce monstre oppose une barrière,
Immole au dieu des flots, qui hait tels attentats,
Un tyran qui triomphe en mordant la poussière.

Vois, te tendant les mains, un reste déplorable
Des barbares repas d’un géant furieux ;
A la trace du sang, suis, vengeur équitable,
L’homicide altéré qui dépeuple ces lieux.
L’implacable Junon, qui met tout en usage
Pour se venger sur toi de son époux volage,
Plus timide que toi, te devance où tu vas :
Brave de son courroux les impuissans éclats ;
Brave le désespoir d’une épreuve dernière,
Qui garde pour trophée, à ton bras déjà las,
Un tyran qui triomphe en mordant la poussière.