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CHANTS ROYAUX.

A CHARLES VIII.

(1495).

Qui fait enfler ton cours, fleuve bruyant du Rosne ?
Pourquoi roulent si fiers tes flotz tumultueulx ?[1]
Que la nymphe de Sayne, au port majestueulx,[2]
De ses bras argentins aille entourant le trosne ;
Tu luy faiz envier tes bonds impestueulx ! 5
Les fleuves, tes esgaulx, coulent en assurance
Parmy des champz flouris, des plaines et des boiz :
Toy, qu’un gouffre parfond absorbe à ta nayssance,
Mille obstacles divers combattent ta puyssauce ;
Tu triomphes de touz[3]. Tel, vengeur de sesdroictz, 10
Charles brave l’Europe et faict dire à la France :
« Rien n’est tel qu’ung héroz soubz la pourpre des royz ! »[4]

  1. Vers 2. Pourquoi tes flots… roulent-ils avec tant de fierté ?
  2. Vers 3. Sayne pour Seine.
  3. C’est la bataille de Fornoue… On sait que Charles VIII, en sortant d’Italie, battit et dispersa l’armée combinée des puissances belligérantes de l’Europe, liguées en faveur de Ludovic, usurpateur du Milanais. Le duc de Mantoue était leur généralissime. Clotilde écrivit donc ce chant en 1495 ; elle était âgée alors de quatre-vingt-dix ans et plus. (Note de M. de Surville.)
  4. Vers 12. (Cette première strophe est sans doute ce qu’il y a de plus inconcevable dans toutes les poésies de Clotilde. En écrivant