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Biégor dans los états généraux (1302), où ils forment lo

""progrès de la royauté. Grâce à tous ces appuis, le rovaumo capétien grandit on puissance. Sous saint Louis, de vastes provinces s’y étaient aiouléos : le Vorraandois, l’Artois l’Amiénois, la Normandie, le Limousin, le bas LaDL’uo’doc ; dans d’autres, los rois se bornèrent à installer des princes do leur lamillo : les duchés d’Auvergne, do Bourgogne, los comtés du Maine, d’Anjou, do Poitou, d’Auvergne, de Toulouse, do Provence, où los vieilles dynasties s’étaient éteintes, obéissaient maintenant 1 des dynasties capétiennes. Louis IX avait montré à l’univers l’idéal du chrétien sur un trône, égalant on majesté les empereurs do Komo, on sainteté lo pape, los évèquos et los ascètes.

l.,a période qui va do Philippe Auguste à la mort de saint Louis (1270) est la plus belle do l’histoire française au moyen âge ; l’équilibre s’est établi entre tous les pouvoirs légitimes do l’époque : royauté, féodalité, Eglise, liberté municipale. La population fut alors plus nombreuse, la vie plus facile et plus large ; lo génie français commença à se dégager et se manifesta par une architecture nationale, par Tes premières œuvres de poésie et d’histoire en langue française.

Une tout autre période allait commencer avec Philippe lo Bol. La royauté prônait conscience d’elle-même comme d’un pouvoir absolu qui n’avait à transiger avec aucun autre principe. A côté des gens d’épée et d’église venait de se formor une classe toute nouvelle, los légistes, puisant leurs inspirations dans le droit romain et dans la tradition impériale, professant que le roi, comme l’empereur romain, est la « loi vivante » , et que ■ ce qui plaît à faire au roi doit être tenu pour loi ». C’est sous l’influence de ces juristes que la royauté française prit une orientation nouvelle. Fatalement elle allait se heurter aux forces sociales qui avaient abrité et protégé son enfance : l’Eglise, les villes et cités, le peuple mémo.

L’Eglise de Franco était toute nationale, dévouée au roi, supportant sans trop se plaindre do ses empiétements sur les juridictions et sur les revenus ecclésiastiques. Co fut le pape Boniface VIII qui tenta de s’opposer à ces empiétements, en recourant à larme terrible de l’excommunication. Philippe lo Bol y répendit par le soufflet d’Anafni. La captivité d’Avignon, puis le grand schisme, en iminuant la puissance pontiflcalo, débarrassèrent la royauté d’une influence fâcheuse pour le pouvoir absolu. D’autres coups s’adressèrent à la féodalité et aux villes libres. Sur les débris des anciens pouvoirs, les légistes purent élever l’éditice de la royauté nouvelle, avec le droit exclusif de légiférer, les grands corps de judicature et de finances, le Conseil du roi, le Parlement, la Chambre dos comptes : avec une hiérarchie de fonctionnaires nommés et révoques par le prince : prévôts, baillis, sénéchaux, administrateurs et juges ; avec la subordination do toutes les juridictions féodales, municipales ou d’église, aux juridictions royales ; avec la limitation du droit do guerre privée et l’éhauche d’une armée permanente royale ; avec un service d’impôts de plus en plus régulier, mais de plus on plus lourd.

Hésislances auxquelles se heurta l’essor de la royauté, rfe la guerre de Cent ans à la Fronde. A mettre en action de tels principes, il n’eût pas été nécessaire d’attendre Louis XI’V pour voir s’établir en France la monarchie absolue. Mais, du xiv" au xvil» siècle, survinrent des événoments désastreux pour la nation, qui réveillèrent en elle toutes les forces hostiles à la royauté. Ce furent : 1° les désastres de la première partie de la

fuerro do Cent ans, et qui aboutirent à la captivité du roi can ; 2" ceux do la deuxième partie do cette lutte qui aboutirent à démembrer la Franco et à introniser dans Paris un roi anglais ; 3» les guerres de religion, où l’on vit le moment où la couronne de France allait tomber entre los mains d’un prétendant espagnol ; i’ les guerres civiles des minorités de Louis XIII et de Louis XIV.

Durant ces luttes contre la royauté, ce n’est plus l’ancienne aristocratie nui mène Tattaque. C’est autour de princes du sang royal (luo se groupent les rebelles. Encore leurs elTorts eussênt-ils été impuissants s’ils n’avaient trouvé un appui, suivant les époques, dans les bourgeois des villes et surtout lo peuple de Paris, dans le fanatisme huguenot ou catholique, surtout dans les officiers mêmes do la royauté et les institutions créées par elle : los états généraux, inaugurés par Philippe le Bel (1302), l’Université, ’ondée par Philippe Auguste, lo Parlement, même les gouoernenrs de province institués par François I".

Mais la royauté ne perdit jamais entièrement le contact avec le sentiment national. L’excès même des misères nue produisirent ces révoltes démontrèrent sa nécessité. Le pouvoir royal fut restauré : après les malheurs du roi Jean, par Charles V ; après les hontes du traité do Troyos (14201, par Charles VII et Louis XI ; après los guerres do religion, par Henri IV ; après la régence do M.arie do Méilicis, par Kic’holion ; après la Fronde, par Louis XIV. Dès U’iio. la Franco forme un Etat compact, auquel il no man.iue, pour être la Franco d’hier, que lo Koussillon, l’Artois, la Flandre, la Franche-Comté. l’Alsace, la_ Lorraine, la Corso, que lui donneront Hichelieu, Louis XIV et Louis XV. , ,,

Les rapports entre la royauté et l’Eglise ont été réglés par le Concordat de François I"(iniii). La justice royale s’exerce par lo parlement do Paris et les parlements de province, par les présidiaux, prévôtés, bailliages, sénéchaussées ; Louis XI a établi le principe de la séparation entre los ofticos d’administration, do justice et de finances. Charles VII a créé les premiers impôts permanents sous le nom de taille periiétuelle (il ;w). Après los essais de Charles VII (compagnie d’ordonnance, francs archers), de Louis XI (gardes suisse et écossaise), de François I" (léirions provinci :iles, d’où naquirent les premiers régiménts <l’iiifauterie),il existe un noyau d’armée permanente. Depuis François I", il y a une marine de guerre et des colonies. L’administration se régularise : du conseil du roi s’est dégagé lo Consed d’Ktal, f|uo va solidement organiser Richelieu ; los secrétaires d /Ctat ou ministres datent du xvi* siècle ; les intendants apparaissent A la mémo époque, en attendant que Uicheheu fasse d’eux les instruments énergiques de l’absolutisme.

Richelieu a mis fin au protestantisme on tant que parti politique, dompté l’orgueil des nobles, supprimé les grands officiers do la couronne, discipliné, par la fondation de VAcndémie française (I63r,i, la » république des lettres •. La royauté absolue va s’incarner en Louis XIV.

f ;

Armoiries de la maison de France, avant n89.

Le despotisme royal ; de Louis XI’V à Louis XVI. Louis XIV a, dans ses Mémoires, formulé avec une rigueur nouvelle la théorie de la monarchie absolue : • ’l'ouie puissance, toute autorité résident dans la main du roi... La nation no fait pas corps en Franco : elle réside tout entière dans la personne du roi. • Le roi a la pleine puissance publique, il est propriétaire de la Franco et le maître de la conscience do ses sujets : t Cujus reqio, ejus religio. ■>

La pratique suivit la théorie : le château de Versailles fut construit tout exprès pour quo le monarque, loin du tumultueux Paris, pût y exiger des honneurs presque divins. Là so fonda • le culte du roi •. La sculpture, la peinture, la poésie, se donnent pour tâche la divinisation du a Roi-Soleil ».

L’Eglise do France est dans la main du prince : ce qu’elle appelle ses « libertés gallicanes ■, c’est le droit de lui obéir do préférence au pape. Tel est le vrai sens de la ■ déclaration de 1682». Le tiers état subit lo joug commun. Le Parlement a

reçu du monarque la

défense expresse d’exa-

miner ses édits. Les

états généraux ne se-

ront plus réunis avant

1189. Les états provin-

ciaux, dernier vestige

de l’autonomie des pro-

vinces, ne servent plus

qu’àvoterdes subsides.

C’en est fait des liber-

lés municipales : car le

roi nomme les consuls,

maires ou bourgmes-

tres. Il n’existe plus do

garanties pour les per-

sonnes : tout sujet est

à la merci d'une >< lettre

de cachet » ; tout accusé

peut être enlevé à ses

juges et traduit devant

une " commission extra-

ordinaire » ; toute pro-

priété est à la discré-

tion du roi, qui peut la

confisquer sans juge-

ment. Aucune liberté

pour la presse : on n’imprime que par « privilège du roi «. Les livres suspects sont brûlés par lo bourreau, les auteurs embastillés. En 1685, l’édit de Nantes, qui, sous Henri IV, semblait avoir mis fin aux luttes religieuses, est révoqué. Les jansénistes, cependant catholiques, sont à peine mieux traités que les protestants.

Lo mémo despotisme qu’il exerce sur la France, Louis XIV entend l’exercer sur l’Europe. Louvois et Colbert ont mis à sa disposition une armée et une marine formidables. Il entreprend des guerres injustes ou de pure « magnificence », soulève des coalitions formidables, s’enorgueillit do pouvoir lutter seul contre tous. Il traite les peuples avec la même dureté que les princes : il met à feu et à sang le Palatinat, écrase sous les bombes la ville de Gênes. La guerre est une « alfaire du roi ».

Au xviii" siècle, la théorie de l’autocratie reste identique. Le ministre des finances de Louis XV, Terray, répond à un plaignant : « .apprenez. Monsieur, que les biens des citoyens sont ceux du roi. » Le faible Louis XVI ne s’exprimera pas autrement : « C’est légal, parce quo le veux. »

.Vourement d’idées hostile à la royauté. Mais, dans les masses et dans l’élite de la nation, une évolution profonde s’était opérée. Le xvm" siècle fut une époque de bien-être relatif pour les classes rurales, et le nombre des paysans propriétaires s’accrut énormément. L’industrie, bien qu’entravée par un excès de réglementation, par l’organisation étroite des corporations ; le commerce, bien que gêné par un système compliqué de douanes, so développèrent. La richesse s’accrut dans les classes moyennes. La littérature s’émancipa jusqu’à la critique et à la raillerie. La philosophie se prend à disserter sur la tolérance religieuse, la liberté politique. la réforme des lois pénales, la vanité des distinctions sociales. A la théorie do la monarchie de droit divin, Montesquieu oppose la théorie do la monarchie parlementaire ; Rousseau la théorie du contrat social.

Nécessité d’une révolution. Les parlements, dans leur lutte contre la royauté (1788), avaient fait appel aux ét.ats généraux. Co fut bientôt le cri de la nation. La royauté avait tué lo crédit public. Les ressources que lui refusaient les notables (1787). seule la réunion des états génér <aux pouvait les lui accorder. C’est par détresse financière qu’elle dut recourir à cet expédient.

La royauté, durant sa lutto sécnlairo contre les anciennes "forces sociales, n’avait détruit de celles-ci que ce qui gênait l’exercice du pouvoir absolu, laissant subsister ce qui ne gênait que la nation : les dîmes ecclésiastiques, les redevances féodales, les corvées, l’exercice dos justices féodales, l’inégalité dans l’impût, l’inaptitude des roturiers aux hautes fonctions de l’Eglise et de l’armée.

La Hévolulion. Les états généraux, convoqués on mai 178y, se composaient, pour moitié, de députés du clergé et de la noblesse, pour moitié do députés du tiers état. Ceux-ci, qui représentaient les quatre-vingt-dix-neuf centièmes do la nation, exigèrent la fusion des trois ordres ; du couj), les états généraux disparurent pour faire place à uno .Xssemhlée nationale. Le roi avait prétondu limiter lo droit de celle-ci à réformer les abus ; elle prétendit non seulement les abolir, mais, en outre, doter la France d’une constitution. Elle prit le nom de Constituante ; elle formula sa Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ; elle entreprit, comme sur une table rase de reconstruire la Franco. Louis XIV avait déclaré que • la nation réside tout entière dans le roi < ; la Déclaration affirme quo • lo principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation : nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité nui n’en émane expressément • . C’est la fin de la royauté . de droit divin • ; c’est la fin du clergé et de la noblesse en tant que corps privilégiés. Les légistes d autrefois soutenaient quo la loi. c’est la volonté du roi ; la Déclaration affirme que . la loi est l’expression do la volonté générale ■>. Toutes les libertés sont consacrées par la Déclaration : liberté personnelle, liberté de conscience, liberté do parler, d’écrire, inviolabilité do la propriété. En mcmo

FRANCE

temps s’établit l’égalité de tous los citoyens devant la loi, l’impAt, les fonctions publiques. Dans la narion so confondent toutes les distinctions entre individus, provinces, villes, bourgs et villages. Les noms mêmes des provinces sont remplacés par ceux des départements. Toutes les distinctions entre droit romain et droit coutumicr sont abolies : il n y a plus qu’un seul droit. A la variété des anciennes juridictions succède la hiérarchie dos justices de paix, tribunaux de district, tribunal de cassation ; la justice criminelle est confiée au jury. Dans l’armée, tous doivent le même service, tous sont également admissibles à tous les grades. Eu matière de finances, tous doivent, proporlionnetlanent k leur fortune, les mêmes ■ contributions-.

Dans l’organisation des pouvoirs publics, l Assemblée nationale semble s’être préoccupée surtout de désarmer la royauté. Elle déclare le roi inviolable, par conséquent irresponsable, donc impuissant ; elle rend les ministres du roi justiciables des représentants du peuple. Aux agents royaux elle substitue des conseils élus. Pour les juges, les officiers do l’armée, les évoques, elle institue un régime électif.

La Révolution amena la guerre avec l’Europe monarchique. Cette guerre, pouvait-on la soutenir avec on . chef du pouvoir exécutif ■ qui était membre de la famille des rois ? L’Assemblée législative le laissa détrftner par le peuple (10 août 1792) ; la Convention s’érigea en juge do co qu’elle appelait ses trahisons et le frappa d’une sentence capitale (21 janv. 1793). Elle s’arrogea les trois pouvoirs ; législatif, exécutif et même judiciaire. En outre, la Convention crut quelle ne pouvait souteiiir [a lutte contre l’étranger en conservant les institutions de la Constituante, qui avaient si complètement désarmé le pouvoir exécutif. Elle les laissa subsister, par respect des principes ; elle vota même la Constitution de 1793. qui alTaiblissait encore plus l’autorité centrale ; mais, à coté d’elles, la Convention institua tout un ■ gouvernement révolutionnaire • , reproduisant dans ses traits essentiels le régime de la monarchie absolue. Par son Comité de Salut public, elle exerça une autorité aussi despotique que Louis XI . Mettant sur pied l’armée réiolutioimaire de l’intérieur, au iieu des ■ intendants ■, elle eut les représentants en mission ; au lieu des • commissions extraordinaires •, elle eut le tribunal révolutionnaire : au lieu des lettres de cachet, la loi des suspects : les propriétés furent soumises au droit de réquisition ; les personnes furent arrêtées arbitrairement ; la liberté de la presse, la liberté de conscience furent violées. Tout plia sous l’implacable volonté de la Convention. Du moins l’Europe fut vaincue. Mais le despotisme d’une assemblée avait fraye les voies au despotisme d’un empereur. . „ . .. ,.

Dictature militaire : le Consulat et l’Empire. Napoléon consolida la plupart des réformes sociales accomplies par les assemblées de la

Révolution. U codifia,

après sélection, les lois

civiles et pénales

qu’elles avaient vo-

tées. Il admit le con-

trôle du pouvoir exé-

cutif par des assem-

blées (Conseil d’Etat.

Corps législatif. Tribu-

nal, Sénat), mais pesa

sur elles de tout le pres-

tige d’un César cou-

ronné. Il nomma les

juges, les fonctionnai-

res, les officiers et,

après le rétablissement

du Concordat, les ar-

chevêques et évêques.

11 conserva les conseils

élus do département,

d’arrondissement , de

Armoiries de la France, «eus le premier et le second Empire.

commune, mais in- , ■ t •■<■ ■

stalla au-dessus d’eux des agents du pouvoir exécutif : le préfet, le sous-préfet, le maire. Il modifia la hiérarchie des tribunaux, et, auprès d’eux, organisa fortement le ministére public {procureurs généraux, procureurs mperioux, etc.). Il maintint le jury, mais frappa les lurys indépendants. Il rétablit, sous le nom de droits reums. les impôts indirects abolis par la Constituante, et créa des organismes financiers qui en assurèrent 1 exacte perception. En général, il respecta la liberté do conscience ; mais il anéantit la liberté de réunion et d’association, ainsi que la liberté de la presse.

Ce despotisme. Napoléon 1 exerça sur 1 Europe avec autant de rigueur que Louis XIV, et provoqua chc» elle encore plus de coalitions et do révoltes. Moins heureux quo Louis XIV, il finit par y

succomber. L’ancienne

dvnasiio fut restaurée.

’Les gouvernements

parlementaires : Ites-

tauralion et monarchie

de Juillet. Ia Restau-

ration (1814-1830) et la

royauté de Juillet {S30-

1848) furent des monar-

chies parlementaires.

Les deux royautés con-

servèrent à peu près

toutes les institutions

administratives, judi-

ciaires et financières

do Napoléon. Elles

gouvernèrent avec lo

concours d’une Cham-

bre des pairs nommée

par lo prince et d’une

Chambro des députés

élue par la nation.

Mais, à leurs yeux,

dans la nation, le . ’

. pays lécal » avait seul une existence politique. Il so composait’d'un nombre restreint d’électeurs, qualifiés de censitaires. Le cens était déterminé par le payement d un chiiîre minimum de contributions directes.

Sous la Restauration, lo nombre des électeurs ne dépassa point ’.lo.oort. Le ■■ pays lég ;U . se composa presque uniquement des propriétaires fohciers ; il eut, en général.

Armoirie* de la France,

sous la Restauration.