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sous la forme d’emplâtre autour du plexus brachial ou d’un gros tronc nerveux d’un des membres d’un animal, ne produit ni paralysie, ni convulsions dans le membre : il faudroit vraisemblablement, pour déterminer quelques effets remarquables par ce moyen, qu’il existât à la surface du nerf une assez grande quantité de vaisseaux lymphatiques, pour qu’il se fît absorption d’une suffisante quantité de particules de cette substance ; et alors l’effet produit, dépendant de l’action du cerveau, n’auroit pas plutôt lieu dans un membre que dans l’autre.

Ce n’est nullement en agissant sur les extrémités nerveuses de l’estomac, comme le pensoit With, que l’opium produit des effets particuliers sur le cerveau. M. Nysten ayant fait sur un chien la section de la paire vague des deux côtés, a introduit dans l’estomac de cet animal, après avoir laissé calmer les effets résultant de cette section[1] une suffisante quantité d’opium pour l’empoisonner ; l’animal est mort au bout de deux heures après avoir éprouvé les phénomènes ordinaires que produit l’opium à forte dose, tels que l’ivresse, la somnolence et les convulsions. Cette expérience avec celles que M. Nysten a faites sur les membranes séreuses, lui fait penser que l’opium arrive au cerveau en passant dans le système circulatoire : cette opinion est confirmée par le fait suivant. Lorsque l’on a empoisonné un chien en injectant une dissolution d’opium dans la plèvre, on ne retrouve jamais dans le thorax qu’une partie de l’opium injecté ; et lorsque la quantité d’opium n’a pas été suffisante pour tuer l’animal et qu’on ouvre ensuite son thorax, on voit que tout a été absorbé : mais la partie de l’opium absorbée a échappé aux recherches chimiques que M. Nysten a faites pour la trouver.

L’opium ne contient pas un principe calmant et un principe narcotique que l’on puisse isoler ; c’est par la même propriété qu’il calme et qu’il cause une espèce de stupeur, un trouble dans l’action du cerveau, un sommeil plus ou moins agité, les convulsions et la mort, suivant la dose à laquelle il a été donné. Les phénomènes qu’il produit à forte dose ne prouvent pas qu’il est irritant ; car lorsqu’on fait périr un animal en laissant couler le sang d’une artère ouverte, il meurt souvent dans les convulsions. Si la partie résineuse de l’opium a une propriété irritante, comme résine, cette propriété est tellement neutralisée par la propriété narcotique, qu’on ne peut guère tenir compte de ses effets. Cette substance n’enflamme pas la membrane muqueuse de l’estomac, même lorsqu’elle a été donnée à très-fortes doses. M. Nysten a reconnu par un grand


  1. Cette opération a été faite en deux tems, c’est-à-dire qu’on a attendu que la plaie résultante de la section du nerf d’un côté fût cicatrisée, avant de faire la section du nerf de l’autre côté : une portion de deux pouces de chaque nerf avoit été enlevée pour empêcher la réunion.