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PRÉFACE

piquante, d’un art si personnel, si souple, si alerte, si puissant, et où surgissent parfois, comme foudroyantes, des bizarreries tellement rudes. Ainsi l’âme humaine : elle ressemble à la vague, s’élance en haut, se précipite en bas ; mais étant toujours l’âme ; et ici, cas plus effrayant, c’est une âme de poète.

Vers 1885, il a quitté le ministère de l’Instruction publique, il prépare le certificat d’aptitude à l’enseignement du dessin, obtient ce diplôme avec facilité, est successivement professeur au collège de Bourgoin, à celui de Remiremont, au lycée Janson-de-Sailly. C’est là, en pleine classe (1891), que le mal, qui couvait depuis plusieurs années, éclate, le terrasse.

Après plusieurs mois de traitement à Bicêtre, puis une période de vague bohème où il ne faisait plus que de la peinture, enfin un dernier essai d’enseignement au collège de Falaise (1897), il vécut en chrétien austère, il s’efforça d’avoir et garder en son âme le grand courant d’air frais de la pureté absolue, il poussa la piété jusqu’à l’ascétisme, ne voulut plus dormir dans un lit, mais sur le carreau des mansardes, le sol nu des granges, prit pour modèle saint Labre, qu’il avait chanté autrefois, dont il adopta scrupuleusement, pendant près de vingt années, le genre de vie si humble, et désirant imiter mieux encore l’ « ange d’Amette », fit à pied, se nourrissant du pain de l’aumône, trois longs pèlerinages : deux à Rome, le dernier à Saint-Jacques de Compostelle. Si l’on se reportait aux Acta sanctorum, ne trouve-