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PRÉFACE

tilleux sur la tenue des dossiers où pas une feuille ne devait dépasser l’autre, mais moraliste ironique et indulgent qui comprenait les retards du matin, la précipitation à se sauver dès quatre heures moins cinq, même, par ci par là, des absences totales — à condition, par exemple, qu’elles fussent dûment excusées sur du papier à lettre cacheté et confié à la poste, — parce que cet invétéré parisien se plaisait à penser, en riant dans sa barbe grise, qu’il y avait sous roche quelque petite histoire à la Paul de Kock… où lui-même se sentait rajeunir. Le bureau occupait une demi-douzaine d’employés subalternes. Dans la petite pièce où notre fantaisiste besognait sans faire de zèle, bien entendu, son « compagnon de chaîne » était Léopold Lemaire[1], lettré savant, fin, spirituel et doux, travailleur assidu et souffrant du travail à cause d’une imagination trop aimable, trop fleurie pour s’accommoder aux nécessités rigoureuses de la précision administrative, adorablement poli et patient, d’une inlassable gaieté paisible, voilée, on aurait dit, d’inquiétude — peut-être parce qu’il devait mourir jeune — le bon Lemaire, que l’on eût pu surnommer, et plus justement, je parie, que l’empereur Titus, deliciæ generis humani.

Germain Nouveau ne pouvait donc pas compter parmi les damnés de la société moderne, et si on lui

  1. Fils de l’inspecteur général Hector Lemaire qui eut grande réputation dans la vieille université.