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Vous crie à la fois : « C'est assez !
« Cavalier dévorant l’espace,
« Te faut-il donc toute la place !
« Que reste-t-il où ton pied passe ? »
Mais le mistral soufflait toujours…
Balayant les places publiques,
S'engouffrant sous les vieux portiques,
Découronnant les vieilles tours.
En gémissant, les bras du chêne
S’étiraient sous sa longue haleine,
Et les épis d’or de la plaine
Secouaient leurs grains à paniers,
Et des nuages de poussière
Montaient du fond de chaque ornière
S’élevaient de tous les sentiers.
« Assez ! disait la voix des brises,
« Laissez-moi parler à mon tour ;
« Moi je caresse et toi tu brises,
« Je suis le souffle de l’amour »
Mais le Mistral de sa prière
N’entend pas le timide accent,
Car ses baisers sont pour la pierre ;
Il agite au loin sa bannière
Et se redresse en bondissant.
« Je suis l’élan de la pensée,
« Disait-il en refoulant l’air,
« Je suis la poitrine oppressée,
« Qui rugit sous un pied de fer ;
« Je suis l’ardent effort de l’homme,