Page:Nouveau - Poésies d’Humilis et vers inédits, 1924.djvu/165

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Bordeaux, qu’elle aimait beaucoup, à Bagnères, où elle avait passé la dernière saison, à Nice, sa ville favorite après Paris. Je déjeunais ici, je dînais là, je ne couchais pas toujours où j’avais dîné. Pendant un mois les hôtels de mainte et mainte cité eurent le spectacle d’un monsieur qui entrait d’un air sombre, faisait des questions mystérieuses, ne mangeait pas du même appétit que les autres voyageurs, et se promenait à grand bruit, dans sa chambre, au lieu de dormir. Car je l’aimais, je le comprenais enfin, éperdument. Il me semblait toujours la voir s’envoler ironiquement devant moi, en retournant la tête d’un air qui disait : « Imbécile ! mérite-moi maintenant ! »

Je revins à Paris sans l’avoir retrouvée, triste, affreusement résigné à attendre son retour. Alors, par hasard, j’appris qu’elle était depuis quelques jours à Nice, je me hâtai d’y retourner. Quand je me présentai chez elle, je devais être fort pâle, car elle sourit. Je lui dis simplement : « M’aimez-vous encore ? »

Elle me regarda avec la joie contenue des triomphateurs. Puis : « Et vous, commencez-vous à m’aimer un peu ? »

— Ne le voyez-vous pas, méchante ? Pourquoi partir ainsi, pourquoi ?…

— Oh ! parce que !… »

Et elle sourit malicieusement. Je baissai les yeux. « Et cela vous apprendra à vous ennuyer