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l’ont dit certains plaisants, l’oreille au guet, l’œil toujours ouvert, évente tout, entend tout, voit tout. L’intrigue le rencontre par-tout sur ses pas, et se voit dérouter dans ses projets. Dès qu’un complot se trame, il est à la piste : il vous suit les travailleurs, et les prenant sur le fait, les arrête tout court.

L’autre, quoi qu’économiste, est plein d’un grand sens. Une raison forte, un jugement assuré, un coup-d’œil juste, une logique serrée, sont les armes avec lesquelles il attaque nos ennemis, et toujours il est vainqueur.

Tous deux brillent à l’Assemblée par leur sagesse et leur prudence ; et si le parti, qu’on appelle démocrate, n’était composé que de pareils hommes, ou que tous eussent des vues aussi droites, le bonheur de la France s’avanceroit à pas de géant.

Mais il est un troisième parti qui, quoique réuni en apparence aux patriotes, gêne cependant leur marche. C’est celui qui me reste à peindre.

Puisque je l’ai entrepris il faut que j’acheve. J’avoue qu’il m’en coûte : je fais au salut de la chose publique le sacrifice de mon caractere : car mon penchant me porte à la paix, au silence, et je suis peu enclin à scruter les intentions des hommes.

Mon sacrifice est d’autant plus douloureux, que je vois à la tête de ce troisième parti, auquel, pour parler net, il faut donner le nom de faction, des hommes qui ont véritablement contribué à la chûte du despotisme, des hommes fermes qui ont attaqué les abus avec un grand courage. Je me sens un mortel chagrin d’y remarquer un Lameth, un Barnave, même