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nous avoua publiquement que, si notre situation eût seulement duré un jour de plus, il avait pris la résolution, non pas de nous faire tirer au sort, comme il arriva quatre à cinq ans après dans un navire qui revenait de la Floride, où la famine fit tuer un malheureux de l’équipage, mais, sans avertir personne, d’égorger un d’entre nous pour le faire servir de nourriture aux autres. Nous nous traînâmes à Nantes, où nous eûmes beaucoup de peine à arriver.

Léry ne nous apprend point quelle fut sa retraite en sortant de cette ville. D’autres circonstances ont pu faire juger qu’il prit le parti de retourner à Genève. Mais il ne laisse point sans éclaircissement la suite de ce qu’il a déjà dit de l’établissement des Français au fort Coligny. Villegagnon, surnommé justement, dit-il, le Caïn de l’Amérique, abandonna cette place, et, par sa faute, elle tomba ensuite, avec l’artillerie marquée aux armes de la France, au pouvoir des Portugais. Il revint en France, où il ne cessa point de faire la guerre aux sectateurs de Calvin, et mourut au mois de décembre 1571, dans une commanderie de l’ordre de Malte, en Gâtinais, près de Saint-Jean-de-Nemours.