Page:Nougaret - Naufrages célèbres, ou Aventures les plus remarquables des marins, 1843.djvu/27

Cette page a été validée par deux contributeurs.

par quelques traverses dans l’exercice de son emploi, conçut le projet de former en Amérique une colonie de protestants. Ce chevalier était brave, entreprenant et homme de tête. Ses desseins furent déguisés à la cour sous la simple vue de faire un établissement français dans le Nouveau-Monde, à l’exemple des Portugais et des Espagnols. Sous ce prétexte, il obtint de Henri II trois vaisseaux bien équipés, qu’il fit monter par des calvinistes déclarés ou secrets. Il appareilla du Havre-de-grâce au mois de mai, et n’arriva au Brésil que dans le cours de novembre suivant.

Villegagnon, étant entré dans une rivière, s’empara d’une petite île sur laquelle il bâtit un fort qu’il nomma le fort de Coligny. L’ouvrage était à peine commencé, qu’il renvoya ses vaisseaux en France, avec des lettres où il rendait compte de sa situation à la cour. Il en adressa aussi d’autres à quelques amis qu’il avait à Genève. Ces lettres produisirent l’effet qu’il attendait. L’Église de Genève saisit ardemment l’occasion de s’étendre dans un pays éloigné, où toutes les apparences lui promettaient, pour ses partisans, une liberté dont ils ne jouissaient point en France. Aussitôt qu’un habile marin, nommé Dupont, retiré à Genève depuis quelque temps, où il était fort considéré, se fut rendu aux vives sollicitations de Calvin, et eut consenti à diriger l’expédition au Brésil, la réputation de ce chef détermina beaucoup de particuliers de tous états à entreprendre un tel voyage. Jean de Léry, âgé de vingt-deux ans, fut du nombre des nouveaux Argonautes.

Le 7 mars 1557, la flotte, au nombre de trois