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ments, et c’est grâce à cet appui fourni par la musique que la pantomime tragique peut lutter avec la grande sculpture. — Voilà ce que Mlle Meyer a mis en pleine lumière. Je viens de parler de la beauté de ses attitudes dans la grande scène du troisième acte. Bien d’autres exemples seraient à citer. Je me bornerai à un seul, celui de tous qui m’a le plus charmé. C’est au premier acte, quand Elsa agenouillée devant Lohengrin, écoute ses commandements avec l’expression d’une adoration extatique. On dirait la Magdeleine aux pieds du Christ ! Et ce qui fait le charme de ce tableau, c’est qu’à la grâce ineffable d’un Beato Angelico, il unit la beauté de la forme antique. Oui, en vérité, on croirait ici avoir devant soi une statue grecque, animée par les sentiments délicats et tendres que le Christianisme a apporté dans le monde, et auxquels notre musique doit l’existence.

La beauté plastique, telle est bien la base du jeu de Mlle Meyer, mais l’expression poétique en est l’âme et la rieur. Quoi de plus touchant que son arrivée au dernier tableau ! Se soutenant à peine, elle marche tête baissée, et sans avoir la force de dire un mot elle se laisse tomber sur le siège où on l’a conduite. Ainsi elle nous fait comprendre, avec une éloquence à laquelle ne saurait atteindre la parole, que rien n’existe plus pour la pauvre fille, excepté la douleur dans laquelle elle est abîmée. L’instinct dramatique de Mlle Meyer est tel qu’à la première représentation de Lohengrin, cette dernière scène, on peut dire qu’elle l’a jouée trop bien. Elle restait immobile et affaissée jusqu’au moment où Lohengrin, après avoir accusé Elsa, annonçait que maintenant, rejetant tout mystère, il allait se faire connaître. Alors par un mouvement soudain, elle