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l’habitude prise par eux de se dénigrer, de faire le moindre cas de leurs belles qualités, quitte à vouloir, par ailleurs, s’attribuer parfois celles qui précisément leur sont étrangères.

Les trois empires coloniaux successivement édifiés du xive siècle à nos jours, ont ceci de commun que les initiatives individuelles s’y révèlent, non pas seulement énergiques et ardentes, mais persévérantes à l’extrême et que, d’autre part, ce sont les guerres métropolitaines et les excès de la politique continentale qui ont fréquemment compromis — et même annulé à deux reprises — les résultats obtenus. En Guinée, dès 1365, au Canada dès 1618, en Algérie dès 1520, au Sénégal et en Guyane dès 1582, à Madagascar dès 1601, puis à Surate en 1668, à Tourane en 1749, des audaces privées ont planté les premiers jalons et dessiné ainsi les contours de l’effort futur. Qui dira la dose de vouloir obstiné nécessaire à construire ainsi, pierre à pierre, une Inde française, une Amérique, une Afrique, une Asie françaises, en face de pouvoirs publics, parfois hostiles, souvent distraits, dont l’appui fut, en tout cas, singulièrement intermittent ? Sans doute, du domaine indien et du domaine américain, il ne reste aujourd’hui que des débris — ou des noms : tels ceux de la Caroline ou de la Louisiane. Encore ne doit-on pas manquer d’apprécier à sa valeur la magnifique survivance de l’établissement canadien devenu un des joyaux de la couronne d’Angleterre. Mais si dans ces parties du monde, un échec s’est produit — échec consacré par cette paix de 1763 dont le retentissement a pesé lourdement au dehors sur l’estimation des capacités coloniales françaises — le contraste n’en est