Le 24 décembre 1799, devançant le verdict populaire — puisque les Français n’avaient pas eu le temps d’approuver la Constitution de l’an viii soumise, pour la forme, à la ratification nationale — Bonaparte s’empara du pouvoir. Deux mois et demi s’étaient écoulés depuis son débarquement à Fréjus, un mois et demi depuis le coup d’État du 18 brumaire qui avait surpris l’opinion par l’incohérence de la conception et de l’exécution. À l’issue de cette aventure fameuse, trois consuls provisoires avaient été désignés : Bonaparte, Sieyès et Roger Ducos, tandis que deux Commissions recevaient le mandat de reviser la Constitution de l’an iii.
Dans ce triumvirat Bonaparte n’avait point de préséance légale et, au début, il n’avait pas osé l’assumer de fait. Des déceptions répétées l’avaient, en effet, rendu prudent. Lorsque, sur les nouvelles qui lui parvenaient, il s’était décidé à quitter brusquement l’Égypte, il avait l’espoir d’être accueilli en France comme un sauveur. Or, à son arrivée, la France se trouvait déjà sauvée. Masséna, vainqueur de Souvarof en Suisse, Brune, vainqueur des Anglais en Hollande, venaient d’y pourvoir. La coalition se trouvait ébranlée, sinon tout à fait désagrégée. Sans doute, la popularité personnelle de Bona-