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c’est le Chêne de saint Melaine. Du pied de cet arbre vénérable, on jouit de la vue splendide d’un délicieux panorama. On a d’abord à ses pieds les vertes pelouses et les brillantes corbeilles du Jardin des Plantes ; les maisons des faubourgs de la partie orientale de la ville, étagées sur le flanc du coteau au pied duquel se déroule, comme un ruban argenté, le cours sinueux de la Vilaine à travers les fraîches prairies de la vallée ; plus loin, la ligne du chemin de fer de Paris, que trahit à travers les arbres touffus le blanc panache de fumée de ses locomotives ; le joli coteau de Saint-Hélier, que surmonte l’élégant clocher à jour de sa vieille église ; la gare et ses dépendances ; le Champ de Mars, dominé par le coteau de Beaumont où s’élèvent depuis quelques années les bâtiments de la Maison centrale ; plus loin encore, en revenant vers l’est, le coteau de Coësmes qui s’arrondit sur le ciel ; les campagnes de Châteaubourg, de Noyal, de Cesson et de Chantepie au milieu desquelles se détache le château de Cucé, veuf aujourd’hui de son beau parc tombé il y a quelque vingt ans sous la hache des spéculateurs. Au sud le panorama s’agrandit encore jusqu’aux coteaux de Laillé dont on devine le château dans sa forêt de sapins ; puis enfin, dans un lointain vaporeux, le regard se perd sur les hauteurs de Saint-Erblon, d’Orgères, de Bout-de-Lande, de Bourgbarré, de Pont-Réan, du Boël, de Goven, de Saint-Thurial, qui disparaissent dans la brume de l’horizon.

Vue de ce point, la campagne ressemble à un immense bosquet de verdure, et la pensée se reporte aux temps où un épais massif de forêts entourait la primitive enceinte de Rennes, à l’époque où des bois touffus enveloppaient les territoires actuels de Betton, Saint-Grégoire et Thorigné, au nord ; toute la partie comprise entre la Vilaine et la Seiche, jusqu’à Châteaugiron, à l’est ; au sud, Saint-Erblon, Chartres, Saint-Jacques de la Lande, — qui s’appelait encore au siècle dernier Saint-Jacques de la Forêt — ; à l’ouest, Vezin, l’Hermitage, Pacé, Montgermont, Saint-Gilles. L’existence de ces forêts nous est apprise non seulement par la tradition et les

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