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du pouvoir, afin de se livrer sans partage au culte des sciences.

En acceptant cette démission du ministre qui s’était acquis tant de titres à la reconnaissance nationale, Napoléon, pour récompense, le nomma sénateur et grand-officier de la Légion-d’Honneur.

Le secret qu’une politique ombrageuse imposait aux travaux du Sénat dérobe aux suffrages de la postérité les services individuels rendus à la patrie, dans le sein de ce grand corps politique. En donnant à cette assemblé l’organisation mystérieuse et subordonnée, propre à préparer un Sénat de Tibère, l’Auguste moderne y rendais impuissante la vertu même. Cependant, quelquefois encore, dans les occasions solennelles où la voix du Sénat parvenait au pied du trône, l’amour de la paix et de l’humanité faisait entendre ses préceptes à l’inflexible conquérant. Telle fut l’allocution du comte de Chanteloup, au sujet d’un monument triomphal qui devait perpétuer la gloire de Napoléon. « Déjà, disait l’orateur, l’herbe recouvre le monument érigé dans la plaine d’Ivry, pour éterniser les victoires de Henri IV ; mais un simple vœu de bien-être pour le peuple s’est perpétué d’âge en âge dans le cœur de tous les Français. » Ah : si jamais l’empereur n’avait entendu que de semblables leçons, il n’eût point tenté ces expéditions sans intérêt pour la France, qui, devenues le tombeau de nos défenseurs, ont enfin laissé sans défense une patrie follement épuisée à multiplier des conquêtes, pour être conquises à son tour.