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Recherches sur la piézo-électricité.

EN COLLABORATION AVEC M. J. CURIE.
(Bulletin de la Société de Minéralogie, t. III, 1880, p. 90. — Comptes rendus de l’Académie des Sciences, t. XCI, p. 383 ; t. XCII, 1881, p. 186 et 350 ; t. XCIII, p. 204. — Journal de Physique, 2e série, t. I, 1882, p. 245.)

Le point de départ de ce travail a été la découverte faite par nous d’un phénomène nouveau : celui de la piézo-électricité. Ce phénomène consiste en un dégagement d’électricité qui se produit dans certains cristaux (quartz, tourmaline, blende, etc.), lors d’une déformation mécanique. La piézo-électricité présente de grandes analogies avec la pyro-électricité, qui est un des phénomènes électriques le plus anciennement connus. Nous avons fait une étude complète du nouveau phénomène, établi les conditions de symétrie nécessaires à sa production dans les cristaux, déterminé les lois du dégagement électrique et mesuré les constantes caractéristiques en valeur absolue pour certains cristaux. Les recherches de MM. Röntgen, Kundt, Czermak, Voigt, Riecke, sur le phénomène que nous avons découvert, ont étendu les résultats de nos travaux.

M. Voigt a édifié une théorie générale complète de la piézo-électricité. Les matières cristallisées se classent naturellement en 32 familles distinctes les unes des autres par les éléments de symétrie de la forme extérieure. Les matières cristallisées qui se rapportent à 21 de ces familles sont susceptibles de donner des phénomènes piézo-électriques, par déformation mécanique homogène. Dans chacune de ces 21 familles, le phénomène piézo-électrique est défini par un certain nombre de coefficients. Il faut, par exemple, 2 coefficients distincts pour complètement définir les propriétés électriques du quartz, lors d’une déformation mécanique homogène quelconque. Il faut 4 coefficients dans le cas de la tourmaline, etc.

Considérons, à titre d’exemple, un parallélépipède rectangle taillé dans un bloc de quartz. Deux faces sont normales à l’axe optique (axe ternaire), deux faces sont normales à un des axes binaires. Si l’on exerce une traction dans un sens normal à la fois à l’axe optique et à l’axe binaire, le cristal se polarise électriquement dans le sens de l’axe binaire et les deux faces qui lui sont normales semblent chargées de deux couches d’électricité de nom contraire. Si l’on recouvre ces faces de feuilles d’étain, on forme un condensateur qui se charge d’électricité quand on exerce la traction. On peut