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effet s'y ramener. Prenons pour exemple le problème des trois corps : ne peut-on pas se demander si l'un des corps restera toujours dans une certaine région du ciel ou bien s'il pourra s'éloigner indéfiniment; si la distance de deux corps augmentera, ou diminuera a l'infini, ou bien si elle restera comprise entre certaines limites? Ne peut-on pas se poser mille questions de ce genre, qui seront toutes résolues quand on saura construire qualitativement les trajectoires des trois corps? Et, si l'on considère un nombre plus grand de corps, qu'est-ce que la question de l'invariabilité des éléments des planètes, sinon une véritable question de géométrie qualitative, puisque faire voir que le grand axe n'a pas de variations séculaires, c'est montrer qu'il oscille constamment entre certaines limites?

Tel est le vaste champ de découvertes qui s'ouvre devant les géomètres. Je n'ai pas eu la prétention de le parcourir tout entier, mais j'ai voulu du moins en franchir les frontières, et je me suis restreint à un cas très particulier, celui qui se présente d'abord tout naturellement, c'est-à-dire à l'étude des équations différentielles du premier ordre et du premier degré.

Je commençai donc mes recherches (2, 73) par l'étude des courbes définies par les équations différentielles de la forme

(1) dx/X = dy/Y,

où X et Y sont des polynômes entiers en x et y, et je reconnus d'abord que ces courbes pouvaient représenter la forme de courbes fermées ou celle de spirales. Je démontrai également le théorème suivant :

Si une courbe définie pur une équation de la forme (1) n'a pas de point d'arrêt et ne coupe aucune courbe algébrique qu'en un nombre fini de points réels, elle est une courbe fermée.

Pour pousser plus loin l'étude de la forme de ces courbes, j'ai dû commencer par rechercher ce qui se passe dans le voisinage d'un point singulier quelconque. En réalité, le problème était résolu par les travaux antérieurs de MM. Briot et Bouquet et par les miens (Journal de l'Ecole Polytechnique, XLVe Cahier, et Thèse inaugurale), mais j'avais à approprier la solution à mon nouveau but; dans les Mémoires que je viens de citer, et où je me plaçais ail point de vue de la théorie des fonctions, j'attachais une égale importance au réel et à l'imaginaire. Pour mon but nouveau de géométrie qualitative, le réel seul m'intéressait et je devais faire une discussion spéciale qui me conduisit à distinguer quatre sortes de points singuliers (sans parler de points singuliers plus compliqués qui ne se p