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ORIGINE DE NOTRE CROYANCE À LA LOI DE CAUSALITÉ

tion d’habitudes motrices. Notre système nerveux est fait pour construire des mécanismes moteurs, reliés, par l’in­termédiaire des centres, aux organes de perception. Ces mécanismes, une fois montés, ont une tendance à entrer en action. Grâce à eux on devine, en apercevant une forme visuelle, ce que serait l’impression tactile corres­pondante, je veux dire qu’on esquisse déjà intérieurement les mouvements qu’il faudait accomplir pour suivre les contours de la forme visuelle. Nous avons montré, dans un précédent travail, que la reconnaissance pratique des formes visuelles se fait surtout par ces tendances motrices, et que l’acquisition de ces tendances motrices est le principal objet de l’éducation des sens. Cela revient à dire que l’opération par laquelle nous adjoignons à une impression visuelle déterminée une impression tactile déterminée n’est pas un acte d’association quelconque, une habitude quelconque. C’est une habitude qui fait partie intégrante de notre vie, c’est une opération à laquelle notre corps tout entier s’intéresse et où tend l’activité fondamentale de notre système nerveux, activité qui est, avant tout, sensori-motrice. L’impression visuelle étant alors ce que nous appelons une cause et l’impres­sion tactile un effet, l’activité sensori-motrice du corps reliant cet effet à cette cause, il s’ensuit que la relation dynamique de la cause à l’effet, la détermination néces­saire de l’effet par la cause, sont senties et vécues ici par nous avant même d’être pensées.