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Devant moi je vis rouge, et mon poing se roidit…
Mais l’enfant me retint : et le soudard maudit
Passa, riant tout haut de sa farce grossière,
Et se perdit bientôt dans un flot de poussière.

Enfin le bataillon, au détour du chemin,
Disparut tout entier : l’enfant saisit ma main.
Les yeux étincelants d’une fierté sauvage,
Résolu, la fureur blanchissant son visage :
« Adieu, dit-il, je pars : je ne puis vivre ici.
— Moi j’y pourrais mourir, enfant, je pars aussi ;
En avant ! »
En avant ! »Nous avons marché la nuit entière
Et dès le petit jour nous passions la frontière.



» Voilà comment, monsieur, j’ai quitté le pays.
L’enfant et moi tous deux nous sommes à Paris.
L’exil nous a rendu ce que nous prit la guerre :
Moi je retrouve un fils, et lui retrouve un père.