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J’ai bien reçu ta lettre et je t’en remercie,
J’apprends avec plaisir que t’es toujours en vie,
Même que tu vas bien, à ce que tu me dis,
Malgré les froids d’hiver et les Boches maudits.
Les gueux !… en ont-ils fait !… Mets-en beaucoup par terre,
Mais sans risquer par trop ta peau, qui m’est ben chère !
Je t’envoie un tricot de laine, des bas bleus,
Un cache-nez… (On sait combien que t’es frileux !)
C’est tout pour aujourd’hui… J’pouvons point davantage :
Chacun souffre, au pays… J’ai presque plus d’ouvrage…
Depuis qu’ton père est mort, ça n’va guère chez nous,
Tu le sais… Moi, j’ai toujours mal dans les genoux…
Puis, un gros rhume… Enfin, tant pis pour ma carcasse,
Pourvu que t’ailles ben… et pourvu qu’on les chasse !
C’est tout ce que j’demande au bon Dieu, pour l’instant…
Je te bige ben fort, mon Pierrot… mon enfant… »